Quelle reprise décevante... Si Sherlock est toujours ce show nous livrant des épisodes d'une envergure digne d'un long métrage, toujours drôles, magnifiquement montés et somme toute divertissants, ce qui fait qu'aucun épisode dans l'ensemble n'est foncièrement mauvais pour moi (pas même celui-là), The Six Thatchers n'est pas une bonne reprise pour la série et en est probablement la pire de toutes.

Mark Gatiss joue toujours aussi bien l'un de mes personnages préférés du show - Mycroft, dont la nouvelle intrigue associée ("Sherringford", le troisième frère Holmes ?) m'excite beaucoup. Mais c'est bien dans le domaine de l'acting que ses talents s'arrêtent concernant la série, car à nouveau aux commandes d'un script, Gatiss patauge à mort.

Et ça se voit un peu. Le scénario tente d'être aussi intelligent que le reste de la série mais échoue : l’intrigue autour des six bustes n’est pas mauvaise (l’énigme du fils brûlé dans sa voiture est amusante). Mais en guise de jeu de piste, on a vu beaucoup mieux, et on quand même l’impression que ça s’essouffle vite, avec plusieurs passages peu mémorables (l’ami hacker de Sherlock qui sort de nulle part, par exemple).

On devine trop vite chaque mystère, la palme revenant au montage final de la prise de conscience de l'identité de la coupable qui se fait en 3 images. La résolution assez gimmick de l'histoire du chantage Amo ne constituant pas un bon twist final. D’ailleurs, comment exactement Vivian s'est servie de l'identité de Smallwood durant toutes ces années et quels intérêts avait-elle exactement ? L’idée de faire porter le chapeau à une secrétaire discrète est bonne, mais le personnage reste finalement très discret par essence, donc peu creusé, comme antagoniste.

En plus, l’épisode a quand même quelques problèmes de rythme. Certaines séquences sont trop longues, répétées inutilement, en trop (les combats à mains nues entre Sherlock et Ajay, bon…). La section sur le passé de Mary est sous-développée finalement, avec Ajay qui est tué presque en hors-champ par un policier ? En tout cas, l’intrigue s’arrête abruptement, et tout est assez con (Ajay qui accuse Mary sur la base d’un “la femme anglaise” sans penser à leur boss, par exemple). Tout ça sent un peu le meublage et les explications sont servies lors de monologues entre 3 personnes dans une pièce, que la réalisatrice tente tant bien que mal de rendre attrayant.

A ce propos, de même : si les talents de Rachel Talalay permettent parfois de rendre une absence de scénario très appréciable car belle à regarder (le montage sur l'échappée de Mary et la scène qui suit), la réalisation n'échappe pas d'être tout bonnement risible dans d'autres occasions, notamment ce sauvetage final de Sherlock dans un ralenti horrible qui donne une scène dans l'ensemble juste ri-di-cule. Et il y a des transitions absolument abominables : les crissements de pneus, les montages “requin” ou des bustes qui se brisent… Je pense même que c’est littéralement l’épisode le plus mal réalisé de la série. C’est juste incompréhensible. Trop de gimmicks et trop de try-hardisme.

Mais après tout, difficile de sauver vraiment les meubles quand le scénario est aussi peu fourni. Typiquement toute la métaphore sur le marchand de Sumatra qui échappe à la mort ou je ne sais quoi, j’ai détesté ce procédé de narration vraiment vide de sens je trouve, faussement poétique, pas dans le ton habituel de la série.

Et puis parlons un peu de ce dernier acte anticlimatique : quelle déception ! On aurait vu le départ de Mary beaucoup, beaucoup mieux maîtrisé, et réalisé. Peu d’émotion transparaît suivant ce climax pourri, contrairement au 3.03 qui arrivait au moins à rendre crédible les échanges entre les époux Watson.

C'est vraiment dommage. Je ne dis pas que l'épisode était parfait jusque là mais il démarrait tout de même assez bien, avec un twist sur la vie de Mary laissant de côté l'intrigue de Moriarty qui était assez malin car représentatif des fans (on avait tous tellement à l'esprit le Did you miss me? qu'on en avait oublié Mary, un truc dont elle se sert même à la fin avec le CD). Si seulement l'épisode lui avait fait plus honneur, plutôt que de présenter une intrigue vide de toute enquête digne de ce nom et ne servant de prétexte qu'à faire partir le personnage et à nous "surprendre"... Son passé n’étant même pas si impressionnant ou substentiel que cela.

Bon, au moins cette résolution, nullissime qu’elle soit, semble malgré tout au moins avoir permis de poser quelques enjeux de la saison. L’arrogance de Sherlock ayant effectivement entraîné Mary, qui se sentait sans doute redevable, à le protéger… cela reste tout de même très capillotracté quand on l’écrit comme ça. Sur le papier en effet, on aurait vu mieux comme enjeu majeur de fin de saison (et de série, en l’occurrence). Dans les faits, la relation John/Sherlock est suffisamment bien posée pour convaincre, même à partir d’un matériel faible.

Le plus gros problème reste finalement cette sensation amère que Mary a eu trop peu de place pour exister. Un épisode introductif, un épisode sur son marriage où elle jouait un rôle plutôt secondaire, un épisode sensationnel où elle est au premier plan mais en tant qu’espion traîtresse, un spécial de Noël pseudo-canon et hop, c’est déjà l’épisode de sa mort.

Enfin, je dirais que le showrunning de la saison qui apporte quelques scènes secondaires, vient plutôt mal s’intégrer au reste. Je pense à l’aldutère de John qui, pour l’instant, ne semble ne servir à l'auteur qu'à faire culpabiliser John en vue de la mort de Mary.

En résumé : assez bon début, twist potentiellement casse-gueule mais intéressant au milieu pour exploiter Mary alors qu’on pensait en avoir fini de son histoire. Puis, quelques scènes/dialogues intelligents, avant que patatra, un scénario de plus en plus con, des révélations qui manquent de punch, une opportunité complètement manquée pour un résultat vide et frustrant.

C’est juste du gâchis.